Vendée – La guerre du sable et des granulats semble déclarée
Vendée – Vision très divergente entre l’Etat et les élus sur l’extraction de Granulats marins au large de Noirmoutier
Historique:
L’État est condamné à délivrer un « Permis exclusif de recherches de granulats marins dans la zone économique exclusive au large de la Vendée« , sous peine d’astreintes financières courant depuis le 21 juillet 2017.
Ce permis a pour objet d’identifier d’éventuelles zones propices à l’extraction de sables et graviers au large de l’estuaire de la Loire.
Le 11 novembre 2017 est donc publié ce permis exclusif de recherches de granulats marins.
La société en question est « Granulats Nord Gascogne. Rue du Verseau 94150 Rungis »
Qu’est-ce que la zone exclusive économique (ZEE) ?
D’après la réglementation et le droit de la mer, une zone économique exclusive (ZEE) est l’espace maritime sur lequel un État (pays) possédant des zones côtières exerce des droits souverains en matière d’exploration et d’usage des ressources.
Cette ZEE s’étend depuis la ligne de bas (ligne de côte) de l’État jusqu’à 200 milles marins soit 370,4 km (au-delà, il s’agit des eaux internationales bien qu’il existe parfois des extensions). La ZEE n’existe pas en mer Méditerranée.
Cette zone est devenue zone de pêche communautaire en 1977 pour la zone Atlantique et mer du Nord. Le Conseil International pour l’Exploration de la Mer (CIEM) a subdivisé la ZEE en 27 sous-zones et en divisions, pour lesquelles sont attribuées annuellement des quotas de pêche. L’Etat riverain ne peut y exercer une règlementation ni une police générale mais y défendre des droits souverains limitativement prévues par conventions ( droits de pêche, exploitation des fonds…).
Granulats
On pourra lire attentivement la fiche jointe:
http://www.dirm-memn.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/fiche2.8_20170411_dsf_fiche_granulats_marins_v.2.3.pdf
Objectifs
Ce Permis exclusif de recherches (PER) au large de la Vendée, est situé dans la ZEE à environ 23 km de la côte et son opérateur prévoit un « engagement financier minimal » de 750.000€ sur 5 ans.
L’objectif est d’acquérir une connaissance précise de la couverture sédimentaire de la zone concernée, et de mesurer les impacts d’une éventuelle extraction sur les ressources halieutiques et la biodiversité.
(NDLR: on parle d’un potentiel de 200 millions m3 de sable à extraire sur 30 ans,disponible au large de Noirmoutier)
La zone concernée est:
- à 12,9 milles nautiques (soit 23,9 km) à l’ONO de l’Île d’Yeu par rapport au sommet C
- à 16,09 milles nautiques (soit 29,8 km) à l’O de l’Île de Noirmoutier par rapport au sommet B;
- à 18,62 milles nautiques (soit 34,5 km) au SE de Belle-Île par rapport au sommet A
- à 22,89 milles nautiques (soit 42,4km) au SO de l’estuaire de la Loire par rapport au sommet A
Raisons du choix de ce site par Granulats Nord Gascogne
« Raisons géologiques :
La zone du P.E.R. présente un fort potentiel du point de vue de la granulométrie et des volumes de matériaux meubles en place (2 paléovallées et un gisement de graviers). Les explorations prévues permettront de mieux connaître les fonds du site, encore peu connus du point de vue géologique, et donc d’enrichir les connaissances des ressources du plateau continental.
Raisons techniques :
Les techniques d’extraction permettent dorénavant d’exploiter des gisements situés entre 50 m et 100 m de profondeur. Par ailleurs, la mise en œuvre des moyens d’investigation sous- marine, que ce soit en termes d’imagerie acoustique ou d’échantillonnage, ne pose pas de problème particulier à cette profondeur.
La géométrie du site est adaptée à une campagne de reconnaissance géophysique de grande emprise, selon de longs profils de levé.
Les dimensions du P.E.R. sont bien adaptées à une reconnaissance partielle des paléovallées au large de l’estuaire de la Loire. Elles permettront également la sélection, en fin de programme, d’un ou plusieurs sites favorables pouvant être compatibles avec une demande de concession. »
Raisons environnementales :
Le programme de recherche est soutenu par les raisons environnementales suivantes :
– les matériaux marins sont des matériaux de substitution aux matériaux alluvionnaires terrestres. En identifiant les gisements exploitables sur le plateau continental, l’exploration des ressources minérales marines permet ainsi d’économiser les gisements d’alluvions terrestres, ou de se substituer en partie à ceux-ci ;
– le site du P.E.R est très éloigné des côtes et du domaine maritime littoral où les conditions d’environnement sont globalement plus sensibles, plus « fragiles », qu’au large, et où diverses activités humaines exercent déjà une forte pression de stress environnemental ;
– la recherche des granulats marins dans le site du P.E.R. n’est pas incompatible avec la protection de l’environnement, moyennant quelques mesures de protection ou de gestion des travaux (mesures présentées au §6).
Raisons économiques
Le périmètre a été choisi pour les raisons économiques suivantes :
– pénurie croissante des ressources alluvionnaires terrestres autorisées ;
– intérêt des granulats marins en tant que matériaux de substitution ;
– position centrale du périmètre vis à vis des marchés régionaux de Bretagne Sud et Pays de Loire. »
La vision de l’Etat sur ce PER au travers du Ministère de l’Economie et des Finances
« Ce permis de recherches s’inscrit dans le plein respect de la stratégie préexistante en matière d’extraction de granulats marins » indique le Ministère.
Notamment, les éventuels droits d’extraction qui seraient attribués à l’issue des cinq années de recherches devront respecter le futur document stratégique de façade (DSF)*. Celui-ci, dont l’entrée en vigueur progressive est prévue à partir de 2019, posera, à l’échelle de la façade maritime, une limite aux volumes de granulats extraits, en fonction des besoins économiques des territoires concernés.
*Document stratégique de façade: L’enjeu majeur de la stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML) est de réussir à faire cohabiter : les usages « traditionnels » (pêche, conchyliculture, défense, transport pêche récréative…) de la mer avec les activités plus récentes (énergies marines renouvelables, algoculture et aquaculture au large, loisirs et sports, exploitation minière et extraction de granulats marins, rejets de dragage…). Elle vise également une prise de conscience des enjeux de préservation et de connaissance des milieux marins (protection des écosystèmes marins et recherche scientifique). Les documents stratégiques de façade (DSF) précisent et complètent les orientations de la stratégie nationale de la mer et du littoral (SNML) au regard des enjeux économiques, sociaux et écologiques locaux pour chacune des quatre façades maritimes métropolitaines 2 délimitées par la stratégie ( art. L.219-3 et R.219-1-7). Ils visent plus précisément à garantir la protection de l’environnement, à résorber et à prévenir les conflits d’usage ainsi qu’à dynamiser et optimiser l’exploitation du potentiel maritime français. Ils sont, en outre, dotés d’une portée spatiale, puisqu’ils constituent les documents de mise en œuvre de la planification de l’espace maritime (PEM).
Le ministère poursuit afin de rassurer:
« Les opérations de recherches seront strictement encadrées dans le cadre des autorisations de travaux qui seront délivrées par la préfecture de la Vendée. Toutes les parties prenantes (opérateur des travaux de recherche, communes côtières, autres usagers de la mer, associations…) seront associées à ces décisions, qui feront l’objet d’un suivi partenarial au niveau local »
Du côté du département de Vendée, on est beaucoup moins confiant. Ainsi Yves Auvinet, président du département, déclare:
« L’autorisation délivrée par l’Etat, sans aucune concertation, d’un permis exclusif de recherche (PER), sur une zone de 432,4 km² au large de l’île de Noirmoutier, en vue d’une possible extraction de granulats marins, est inacceptable. Au-delà de la question du trait de côte et des phénomènes d’érosion que pourrait générer l’activité sablière, c’est l’impact sur l’activité halieutique et sur la ressource qui est inquiétant.
« Nos marins pêcheurs, déjà soumis à de nombreuses normes, et dont les zones de pêche seront impactées par la présence du futur parc éolien offshore pour lequel une concertation est engagée, ne peuvent supporter davantage de contraintes sans risquer de voir leur activité décliner. D’autant qu’une partie de la zone concernée s’étend sur une frayère particulièrement précieuse.
« Nous tenons à renouveler une nouvelle fois notre solidarité envers nos professionnels de la pêche, activité vitale pour notre territoire et constitutive de notre identité. »
Quelques jours après avoir fêté avec les élus du département et ceux de Noirmoutier, le classement du site « Passage du Gois » le Préfet de Vendée va devoir gérer une crise car les élus, que ce soit Yves Auvinet ou Bruno Retailleau (sénateur de Vendée) sont particulièrement surpris par cette décision et de ne pas avoir été informés de ce permis.
Rappelons que Bruno Retailleau, est particulièrement concerné par tous les projets liés à la mer et à la pêche en tant que Président de l’Arc atlantique qui regroupe 17 régions européennes de l’Écosse à l’Andalousie.
Le Ministère de l’Economie et des Finances, dans l’urgence, a décidé l’organisation d’une réunion:
Pour réaffirmer cette dynamique, et afin de partager une vision d’ensemble des usages envisagés de l’espace maritime au large de l’estuaire de la Loire, une réunion associant les principaux élus concernés se tiendra au ministère de l’Economie et des Finances dans les jours à venir. »
Avec certainement l’objectif suivant: trouver un équilibre entre les protections écologiques et halieutique et le développement économique des sociétés d’extraction.
Philippe Brossard-Lotz
Le Reporter sablais
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