[et_bloom_locked optin_id=optin_5] Casino des Sports Xavier Hoffmann. Prospective: une vision iconoclaste pour le Tourisme de demain Avant-Propos Xavier Hoffmann a été, à la suite de ses parents, directeur du Casino des Sports situé à La Rudelière, aux Sables d’Olonne. C’est son grand-père maternel – Alphonse Alonzo, jeune entrepreneur - qui avait lancé en 1923 avec son associé Cyprien Imbert, avocat, un vaste projet immobilier à la Rudelière comprenant « des villas et des habitations à bon marché sur un plan en étoile, l'édification d'un parc des sports, de deux casinos et d'un grand hôtel » Suivirent les créations successives de buvette, salle de bal, salle de jeux, tennis, vélodrome et un terrain de sports qu’utiliseront les Tigres vendéens. La crise de 1929 eut, ici aussi, ses répercussions. Après une liquidation judiciaire en 1934, un concordat en 1935 permit de relancer l’activité. Progressivement, le Casino des Sports - construit en 1928 -, avec sa grande salle de spectacles et ses salles de jeux, prit de l’importance et devint incontournable dans le paysage sablais. Il ne manquait pas de casinos aux Sables d’Olonne entre les années 30 et 50 puisqu’on en comptait trois ! A la fin des années 50, l’ex-Casino des Pins, situé au bout de l’avenue Aristide-Briand à La Rudelière, fut détruit. Deux casinos restèrent en place, le Grand Casino - ou Casino municipal - situé sur l’actuel site des Atlantes et bénéficiant d’un soutien explicite de la Ville - qui y organisait les manifestations officielles -, et le Casino des Sports, un établissement considéré comme privé, géré par la famille Hoffmann dans le cadre d’un bail emphythéotique auprès de la municipalité sur des terrains situés à La Rudelière (le Casino des Sports est devenu le Joa Casino des Pins). Le Casino des Sports à son origine Le Casino des Sports, bien que participant à l’image de la Ville - pratique et compétitions sportives, mini-golf, spectacles, discothèques - et apportant un incontestable supplément en terme de distractions pour les vacanciers, était marqué par une image plus populaire que son concurrent situé sur le Remblai. L’un et l’autre vivaient des périodes difficiles, tous les casinos français souffrant financièrement. La famille Hoffmann tenait le Casino des Sports à flot tant bien que mal. Xavier Hoffmann était à la tête du Directoire familial du Casino des Sports lorsque les autorisations de machines à sous sont arrivées en 1991 grâce à une décision du ministre de l’Intérieur Charles Pasqua. Les casinos purent enfin souffler grâce à cet apport financier, parfois considérable. Nos interviews ont jusqu’ici concerné le plus souvent des élus. Il nous a semblé intéressant, cette fois-ci, d’interroger un ancien chef d’entreprise, très au fait du milieu entreprenial du Pays des Olonnes, ayant géré le Casino des Sports, qui a fait partie de la Chambre de Commerce, et est toujours membre d’organisations regroupant des entrepreneurs. Il a, de plus, été au début de sa carrière Vice-Président du Syndicat d’initiative des Sables d’Olonne et fut amené par la suite à jouer un rôle important dans le tourisme sablais. Le Casino des Sports, dans les années 30 Le Reporter sablais: Xavier, raconte nous brièvement le projet à La Rudelière de ton grand père maternel, projet qui a conduit à la création du Casino des Sports. Et peux-tu aussi nous dire ce qu’il en était dans les années 70-80 lorsqu’ont été créés le Zoo, le petit circuit de la Prévention routière, la Thalassothérapie, le nouveau club de tennis: le Tennis-Club sablais…. Un projet global avait-il été esquissé par la Municipalité sur le site de La Rudelière ? UN EMBRYON DE PROJET TOURISTIQUE A LA RUDELIERE Xavier Hoffmann: Au départ, lors de l’arrivée de mon grand père Alphonse Alonzo au début des années 1920, il y avait une idée de cette sorte puisque la Ville avait négocié la vente et l’aménagement de terrains à bâtir pour y construire des villas. En contrepartie, ils devaient réaliser le Parc des Sports comprenant le stade/vélodrome avec le premier club de tennis, des installations de loisirs pour jeunes et un bar dancing attenant. Beaucoup plus tard, la mairie a montré la volonté de disposer aussi d’un établissement de thalassothérapie. Une première pierre pour la Thalasso avait même été posée à l’endroit du petit parking face à l’ISO. Alphonse Alonzo Vers 1980, nous avions présenté à l’Office du Tourisme, avec un architecte urbaniste, un projet d’aménagement touristique portant sur la totalité du site de La Rudelière. Un village de vacances et un hôtel étaient prévus. Un petit train touristique devaient les relier - ainsi que le Casino des Sports et le Zoo - à la plage de Tanchet. Le projet fut élaboré; il ne restait plus qu’à le…. financer ! Mais en dehors du programme des années 20, je n’ai aucun souvenir d’un projet abouti porté par la Ville des Sables d’Olonne pour développer cet ensemble remarquable qu’est « La Rudelière » dans les années 70. LE CONCEPT D’UNE VILLE RÊVÉE A LA MER Le Reporter sablais: Des plans d’action avaient-il été mis en place à l’échelle de la Ville ou du territoire ? Xavier Hoffmann: J’avais 19/20 ans quand je fus élu vice-président du Syndicat d’initiative aux côtés de Gérard Faugeron. J’ai donc été au fait des dossiers pendant des décennies. Deux dossiers ont permis de fixer des axes stratégiques, l’un mené dans le cadre de la Communauté de Communes lors d’un séminaire d’élus à Noirmoutier, l’autre concrétisant la mise en place d’un « Contrat de station ». Mais aucun vrai plan d’actions collectives (appuyé par une entreprise d’économie mixte public/privé) n’en a jamais découlé, ce qui me semble pourtant incontournable en matière touristique. Plus tard une réflexion urbanistique, pilotée par l’Office de Tourisme communautaire, a conduit au concept d’ « Une ville rêvée à la mer ». Xavier Hoffmann en 1992 LRS: On était alors dans une logique de développement du tourisme. Quelles en étaient les grandes lignes? XH: J’ai toujours défendu l’idée que le tourisme, souvent considéré comme à part, relevait comme les autres sociétés de services des principes économiques les plus classiques. La cible concernée - les vacanciers - et l’aspect festif de l’activité a pu parfois laissé croire qu’il n’en était rien. Ces principes de base sont souvent bafoués car certains ont l’illusion de tout savoir en matière de tourisme sous le prétexte qu’ils partent eux-mêmes en vacances et auraient donc acquis une expérience et des compétences incontestables et suffisantes en la matière pour prendre des décisions avisées. Aux Sables d’Olonne à l’époque, i faut reconnaitre que nous n’avions alors pas la prétention d’une grande stratégie en matière de développement touristique. Nous étions marqués par une sorte de complexe limitant nos ambitions et dont la cause n’était autre que la présence de vacanciers de type congés payés et celle des campings sauvages. Dès lors, la moindre nouveauté que nous découvrions ne pouvait que nous enthousiasmer. Une des conséquences de ce complexe se traduisait par la rengaine de l’ « équipement manquant » qui aurait permis incontestablement de faire venir cette clientèle plus aisée et tant désirée. Chacun espérait donc la réalisation d’un investissement qui dynamiserait subitement le tourisme local. Le souhait d’avoir alors aux Sables d’Olonne un port de plaisance, un hôtel 3 étoiles, ou une thalassothérapie revenait alors régulièrement. Les uns et les autres n’avaient pas totalement tort; il était nécessaire de construire un ensemble d’éléments cohérents afin de permettre à la Ville des Sables d’Olonne d’asseoir une image de qualité, une notoriété et devenir ainsi une ville touristique à part entière. Mais pour cela, j’estimais qu’il fallait aussi accoler à la prestation touristique des éléments indispensables tels que la qualité des routes, une desserte ferroviaire, une variété de restaurants, des hôtels adaptés, des campings, des taxis, des Casinos. Sans oublier des services indispensables: propreté des rues et sécurité des biens et des personnes. Un vrai « package » qu’avaient su mettre en place et maîtrisé des sociétés de vacances comme le Club Med pour ses clubs très à la mode et leur environnement proche, ou des empires comme les Disneyland. Mais aux Sables d’Olonne, l’un des problèmes était que la culture touristique était relativement absente. Sa longue histoire économique était davantage - voire même presque exclusivement - marquée par la pêche et les marais. Il ne fallait pas, dès lors, s’étonner que le milieu industriel et touristique naissant soit quasiment absent des conseils municipaux et des entités d’influence. Ce qui était regrettable et eut certainement des répercussions dommageables pour le futur développement touristique des Sables d’Olonne comparativement à d’autres grandes stations balnéaires. Le Grand Hôtel dans les années 50 UN ECART NON NEGLIGEABLE AVEC LES GRANDES STATIONS LRS: Certains parlent souvent des Sables d’Olonne dans les années 20 à 40 comme d’un lieu très apprécié sur le plan du tourisme balnéaire avec même la présence de personnalités. La nostalgie n’a-t-elle pas opéré plus que de coutume ? XH: Une certaine période faste a existé sur le plan touristique aux Sables d’Olonne. Le tour de France des casinos que j’ai réalisé m’a amené cependant à pondérer cette image, notamment au regard des « marqueurs qualitatifs » que sont le nombre de chambres de gamme supérieure, la taille des Casinos, la présence de villas de prestige, de clubs sportifs haut de gamme, d’un Palais des Congrès ou de restaurants gastronomiques. Les Sables d’Olonne ne pouvait, à cette époque, rivaliser avec des stations comme Deauville, Trouville, Cabourg, Arcachon, Biarritz, Evian, Vichy, Cannes ou Nice. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir les villes thermales tombées en désuétude où figurent en bonne place des hôtels ayant eu leur heure de gloire. A vue d’oeil, ils proposaient chacun des centaines de chambres. Comparativement, notre fameux Grand Hôtel ou l’Hôtel du Remblai et de l’Océan devaient détenir à peine une quarantaine de chambres chacun. LRS: Il est vrai qu’il y avait aux Sables d’Olonne beaucoup de pensions de famille mais peu de grands hôtels. Et pour les Casinos, toujours dans les années 20 à 40, quelle comparaison peut-elle être établie ? XH: Nos archives ne remontent pas jusque-là. Dans les années 50, Les Sables d’Olonne avec ses deux casinos ne se situait, en terme de chiffres d’affaires, que dans le milieu du palmarès national, ce qui faisait d’ailleurs douter l’administration de leurs capacités à attirer de gros joueurs puisqu’elle ne leur attribua l’autorisation d’exploiter la Roulette et le Black Jack qu’en 1974. Ces deux jeux ont toujours été l’apanage de grands casinos à la clientèle fortunée, ce qui n’était pas le cas pour les casinos des Sables d’Olonne. Le revers de la médaille était que ces clients fortunés étaient dans la capacité, si la chance leur souriait, de faire sauter la banque ! LRS: Comment peut-on expliquer que d’autres stations aient évolué à cette époque et pas Les Sables d’Olonne qui en avait tout autant les moyens ? XH: Il y a eu de belles phases de développement aux Sables d’Olonne, avec des constructions de chalets néo-normands sur le Remblai ou de belles villas à la Rudelière grâce à mon grand-père Alphonse Alonzo. Nous n’avions alors pas à rougir avec d’autres sites balnéaires remarquables (une de mes dernières découvertes est la station de Soulac-sur-Mer). Malheureusement d’abord, trop de villas ont été démolies aux Sables d’Olonne. Ensuite, l’absence de rénovation a été préjudiciable. Ma mère, Jeannine Hoffmann, nous racontait à propos de la concurrence entre La Baule et Les Sables d’Olonne que les villes de St-Nazaire et de Nantes ayant été fortement détruites, pendant la seconde guerre mondiale, des logements à La Baule avaient été réquisitionnés pour loger certains de leurs habitants. Et selon elle, à la fin de cette période, les hébergements baulois ont été rénovés ou rafraichis, ce qui ne fut pas le cas pour les logements sablais, propriétaires et professionnels ne se posant pas la question de la pertinence de rénovations. Les Sables d’Olonne s’appuya donc sur une hôtellerie assez ancienne, datant de la fin du 19ème siècle, quand à l’inverse La Baule pouvait compter sur des hôtels prestigieux comme l’étaient L’Hermitage ou Le Royal. D’autres facteurs ont aussi joué comme les problèmes de transmission du patrimoine hôtelier, la concurrence internationale ou les nouveaux concepts pour les vacances. Aux Sables d’Olonne, les propriétaires vieillissant, leur succession se retrouvait sous la pression des promoteurs… A partir du début des années 60, le littoral français a subi la concurrence de l’explosion touristique en Espagne. Le Club Med et les villages vacances de même type ont attiré des clientèles correspondant à notre haut de gamme touristique. Enfin, le développement des stations de montagnes a engendré un découpage des vacances scolaires qui nous a été défavorable. Xavier Hoffmann en 1992 PEU DE FONCIER DISPONIBLE ET L’ABSENCE D’UN GROUPE FINANCIER D’ENVERGURE LRS: Tu fais souvent référence à une forme de statisme des élus et du milieu du tourisme. Peux-tu préciser ta pensée ? On manquait de visionnaires, de bâtisseurs, d’investisseurs ? XH: A la lumière de la genèse touristique des Sables d’Olonne, on peut déceler les premières difficultés ayant empêché un développement vers le haut de gamme. Il faut se rappeler que le tourisme balnéaire a pris son essor grâce aux lignes créées par des compagnies de chemins de fer. Visionnaires et banquiers parisiens se sont souvent alliés dans des projets visant à créer de toutes pièces des stations balnéaires sur d’immenses emprises foncières totalement vierges et donc achetées à bas prix. Ces développeurs faisaient la pluie et le beau temps sur l’administration de ces territoires. Beaucoup plus tard, de nouvelles créations ont été réalisées selon les mêmes principes: nouvelles stations de sports d’hiver, différentes destinations soleil, arc antillais, création par l’Etat de La Grande Motte… Aux Sables d’Olonne, il n’était pas possible de suivre la même logique. La Ville existait depuis longtemps, avec un pouvoir politique bien implanté, et le foncier y devenait rare. De plus, aucun visionnaire ou groupe financier d’importance n’y a envisagé de projet d’envergure. Et le projet sur la route littorale à La Chaume mené dans les années 1950 et 60 a fait long feu. Quelques immeubles panoramiques restent présents, vestiges de ce qui devait être un imposant pôle touristique. A part quelques petits projets sur la dune du bout de ville dans les années 20 ou 30, le seul projet d’importance fut celui monté par mon grand-père Alphonse Alonzo avec son associé Cyprien Imbert sur une cinquantaine d’hectares à La Rudelière, sur des terrains acquis par la Ville des Sables d’Olonne auprès du Château d’Olonne. Seul ce projet peut être considéré comme similaire à ceux lancés dans des stations balnéaires naissantes. L’absence de grands espaces fonciers disponibles a sans doute empêché la réalisation d’un projet d’envergure, sans compter l’état d’esprit des habitants cherchant à préserver leur vie faite de traditions et de simplicité face à un tourisme quelque peu envahissant. Finalement, les locaux étaient assez peu enclins à soutenir une dynamique touristique ! Pour l’anecdote, lorsque mon grand père avait lancé le lotissement à la Rudelière, un membre du Conseil municipal avait critiqué la taille importante des parcelles. Il considérait que c’était gênant d’attirer une clientèle bien plus riche que les gens du coin… Un siècle plus tard ce type d’inquiétude rejaillit avec le projet actuel d’un bâtiment nautique dénommé Yacht-Club. La promotion passe par de belles affiches de tourisme Ici, une affiche incitant les vacanciers à prendre le chemin de fer Ensuite, la venue d’une clientèle dite de congés payés et l’installation de campings municipaux bas de gamme n’ont, bien sûr, pas favorisé un développement qualitatif du tourisme sablais, et l’absence d’équipements structurants et un brin prestigieux a empêché la Ville des Sables d’Olonne de rebondir durant la période des « trente glorieuses ». Nous l’avons nous-mêmes ressenti au Casino des Sports. Les clients aisés, des terriens, des industriels en provenance du Choletais et du Bocage, ont progressivement disparu, favorisant d’autres destinations comme l’Espagne ou la Côte d’Azur. LRS: Quelle était durant cette période d’après-guerre la position des élus sur ce dossier du Tourisme ? XH: Après guerre, c’est une maire communiste qui dirigea la Ville. On peut facilement imaginer que développer le haut de gamme et courir après des touristes aisés n’était pas sa priorité. Pendant les treize années qui ont suivi, le député-maire Charles Rousseau n’aura pas davantage porté d’intérêt à ce sujet. Il faut dire que son histoire et ses activités professionnelles, liées au port, le portaient à s’intéresser davantage à la pêche et aux marins. Ces choix politiques ou liés aux habitudes n’enlèvent rien aux valeurs intrinsèques de ces anciens édiles. Mais pendant que Les Sables d’Olonne restait presque figée, les équipes municipales des grandes stations concurrentes montaient des stratégies avec de gros opérateurs touristiques. LRS: Y a-t-il un moment où des investisseurs se sont intéressés aux Sables d’Olonne ? XH: Quand ce fut le cas, les réalisations ne se sont pas faites avec beaucoup de bonheur…! La vague du boom de l’immobilier, dans les années 1970, nous a valu des immeubles du front de mer sans grand esthétisme. Quant aux réalisations immobilières de Port Olona, elles sont plus que médiocres… Nous avons eu davantage de gestionnaires dotés d’un bel esprit d’entreprise que des investisseurs de qualité. Les entrepreneurs qui ont apporté leur pierre dans le secteur touristique sablais étaient la plupart du temps issus d’autres territoires. Le seul hôtel 3 étoiles existant alors, on le devait à Jean-Pierre Blanchard qui était un bocain (NDLR: un habitant du bocage vendéen). Il en fut ainsi de la famille Girard qui a tenu de nombreux restaurants et bars. M. Siboun qui fut directeur du Casino de la Plage (site des Atlantes) n’était pas un sablais. Si son prédécesseur Léo David l’était, il fit une bonne partie de sa carrière à Paris. Mon grand-père Alphonse Alonzo n’étais pas Sablais non plus, comme bien d’autres. Depuis peu, on constate une montée en gamme générale des équipements aux Sables d’Olonne, ainsi que l’arrivée de grandes marques commerciales; la preuve que la ville a changé de dimension. Concernant l’habitat, de nombreuses maisons individuelles ont fait l’objet de rénovations particulièrement remarquables. Les investisseurs vendéens cherchent désormais à cibler une clientèle plus aisée. UN PROBLEME INSOLUBLE: LA SAISONNALITÉ LRS: Il est souvent fait référence au manque d’hôtels de luxe aux Sables d’Olonne, au moins d’établissements 4 étoiles. La comparaison est souvent faite entre Les Sables d’Olonne et La Baule qui, elle, dispose d’hôtels prestigieux comme L’Hermitage, Le Royal, Le Castel Marie-Louise et bien d’autres. Vous aviez vous-même un projet d’hôtel 4 étoiles dans les années 70 ou 80 au sein du site du Casino des Sports. XH: Durant toute ma jeunesse, j’ai toujours entendu ma mère parler de son projet de création d’hôtel et de Village de vacances. Elle avait affiché sur le mur derrière son bureau un plan d’élévations réalisé par Michel François, architecte et adjoint au maire. L’hôtel était prévu sur la surface utilisée par le mini-golf, et le Village de vacances aurait pu être construit sur le terrain mitoyen à l’arrière là où se trouvait la Cité de la Colonie des Pins maritimes. Mais cela ne pouvait qu’être une espèce de fantasme… car la période était très compliquée financièrement pour notre famille et le Casino des Sports. LRS: Cependant à l’époque cet hôtel avait sa raison d’être puisqu’il manquait de structures hôtelières d’un certain niveau. Vous auriez pu emprunter en vous appuyant sur un dossier solide. Pourquoi n’avez-vous jamais réussi cette réalisation ? XH: Oui, cela pouvait avoir sa raison d’être au-delà de l’image de fantasme. Mais ne faisons pas preuve d’anachronisme ! L’image et la rentabilité financière des casinos aujourd’hui, n’ont rien à voir avec celles d’hier… Et il en est de même pour l’image des Sables d’Olonne. D’abord, beaucoup de casinos, et donc le nôtre, vivotaient et n’avaient pas de marge de manœuvre financière. Jusqu’à l’obtention de l’autorisation des machines à sous en 1991, les établissements financiers ne leurs accordaient pas de prêts d’importance, et ne participaient pas à leur capital social. Ensuite, il faut être réaliste, au Casino des Sports, même si nous avions une bonne vision du marché et de la gestion du loisir et du tourisme, nous n’avions pas suivi de formation initiale en école de commerce nous permettant d’appréhender les méthodes de financement de ce type de projet. Ce qui fait qu’à notre époque et à notre niveau, trouver de l’argent auprès d’un établissement bancaire sablais ou vendéen n’était même pas pensable d’autant plus que la difficulté était accrue par l’exigence d’un apport à hauteur de 50%. La saisonnalité de notre activité (NDLR: en zone station touristique, les casinos ne purent ouvrir jusqu’en 1978 que d’avril à septembre-octobre) ne pouvait que rafraîchir l’ambition d’un investisseur national soucieux de son placement. En tout cas, nos recherches de partenaire financier furent infructueuses, peut-être en raison de l’image du tourisme vendéen en général et sablais en particulier qui souffrait d’un niveau de gamme insuffisant. De plus, aucun texte législatif n’encouragait l’investissement dans les PME non industrielles… Aujourd’hui, les textes, la mondialisation, l’importance donnée à l’économie, facilitent la circulation de l’argent et les investissements. LRS: Et la saisonnalité n’est plus ce qu’elle était ! XH: En effet. Imaginer ouvrir la salle de dancing du Casino des Sports à Noël, c’était impensable. Les hôtels sablais étaient contents lorsqu’ils avaient obtenu un taux d’occupation de 55 à 60%. Aujourd’hui, le tourisme et l’image de la Vendée ont évolué, des résidents secondaires ou des visiteurs n’hésitent pas à venir lors de week-ends ensoleillés et durant toutes les vacances scolaires. En plus la démographie locale a évolué, et le « papy boom » améliore la durée de présence dans les résidences secondaires. DEUX CASINOS: UN DE TROP ? LRS: Parlons un peu de cette époque entre les années 30 et 70 car cela peut éclairer sur un certain état d’esprit en matière de tourisme et de loisirs aux Sables d’Olonne, ainsi que sur les logiques ou visions politiques durant ces décennies. A l’époque de tes parents, il y avait une sorte de vision hostile, je dis bien hostile, du Conseil municipal sablais car il y avait d’un côté le Casino municipal et de l’autre, vous la famille Hoffmann, qui aviez l’image du casino « commercial ». XH: Oui. Cela nous était rappelé régulièrement par notre mère. Il y a eu des périodes qui furent très compliquées, qu’elle a vécues et subies lorsqu’elle dirigea le Casino des Sports à la suite du décès de mon père, une sorte de guerre de trente ans… Il y a eu des « coups de gueule » entre mon grand-père Alphonse Alonzo et le député-maire Charles Rousseau. Mais, il y a eu aussi des répits puisqu’un jour le député-maire était venu lui proposer la gestion de l’autre casino, le municipal… Mais, malheureusement, mon grand-père était atteint d’un cancer à un stade avancé et avait dû refuser. Le Grand Casino (municipal) Note de la Revue: Rappelons quelques aspects historiques. Le Grand casino (municipal) fut créé sur au bout du Remblai près du Grand Hôtel. A l’opposé géographiquement, un autre Casino avait été créé à La Rudelière, le Casino des Pins (NDLR: rien à voir avec le Joa Casino), avec une belle structure et doté d’un théâtre. En 1934, en raison des retombées de la crise de 1929, le Casino des Pins fit faillite. Et Alphonse Alonzo connut la même mésaventure pour son Lotissement de La Rudelière. Alphonse reprit la gestion de l’ensemble de loisir du Parc des Sports qui comprenait le stade, le vélodrome, les tennis, les jeux pour enfants ainsi qu’un dancing /buvette. A la fermeture du Casino des Pins, il demanda une autorisation des jeux d’argent et c’est ainsi que fut créé le Casino des Sports. Restaient donc en activité deux casinos sur les trois ayant existé. Situés chacun à l’une des extrémités de la Ville, ils se firent d’abord une concurrence légitime lorsque Léo David géra le Grand casino, puis ils rentrèrent dans une vraie guerre commerciale à l’arrivée de son successeur. ______________ Le Casino des Pins L’animosité coulait de source au regard des conditions dans lesquelles s’était déroulée la succession de Léo David pour le Grand Casino. Léo David ayant décidé de se retirer, un accord de principe avait été passé avec ma mère pour reprendre la gestion du Grand Casino. Apparemment avec la bénédiction de la plupart des élus. Mais, à la suite d’un coup de Trafalgar, la concession revint à un outsider sans expérience en matière de gestion de casino puisqu’il tenait un cinéma en ville. Ma mère, considérant que cette attribution n’était que la conséquence de copinages au sein de l’administration de la Mairie, c’est peu dire que les relations tant avec le nouveau concurrent qu’avec les élus ne furent pas au beau fixe durant plusieurs années. Ma mère eut longtemps des ressentiments, allant même jusqu’à présupposer qu’elle était sans doute mise à l’écart car elle était une femme et descendante d’une famille italienne. Les discriminations ne manquèrent pas, comme par l’exemple l’oubli du Casino des Sports dans les plaquettes du nouvel Office de Tourisme (en conflit d’intérêt avec les anciens Syndicats d’initiative)…… ou la création d’un club de tennis municipal visant à concurrencer celui du Parc des Sports géré par notre Casino…. ou l’absence de fléchages urbains vers notre établissement. Des éléments bien puérils au regard de la nécessité de monter une stratégie touristique pertinente avec des partenariats entre les deux casinos. Toujours est-il que cette ambiance et les désagréments qui en découlaient ne facilitaient pas la tâche pour ma mère alors qu’elle avait le mérite de gérer seule le Casino des Sports après le décès de mon père. Xavier en compagnie de sa mère Jeannine Hoffmann Cette concurrence stérile épuisait commercialement chacun des deux casinos, se regardant en chiens de faïence, chacun installé à l’un des bouts de la ville… Une situation qui a forcément réduit à néant la mise en place d’une politique touristique ambitieuse* et augmenté l’écart avec les stations balnéaires concurrentes. *Note: l’activité des deux casinos ne se limitaient pas aux seules salles de jeux d’argent. Activités et compétitions sportives, animations culturelles, show et spectacles, boîtes de nuit etc.. drainaient des milliers de clients. Leur impact sur le tourisme sablais était donc conséquent. LRS: Le Casino des Sports, avant les machines à sous en 1991, c’était donc la galère financière… C’était très saisonnier, des croupiers inscrit 6 mois à l’ANPE, une gestion infernale pour vous en terme de ressources humaines… XH: Oui, mais c’était le cas dans tous les casinos de France. Une gestion très compliquée. En 1978, nous avions eu l’autorisation d’ouvrir à l’année ce qui nous a permis de vivoter un peu durant l’hiver. Ces autorisations étaient liées au classement de la ville: balnéaire, thermale ou climatique. Il faut savoir que l’installation des casinos, quel que soit le lieu dans le monde entier, n’ont pas été installés pour le bon plaisir de la population locale. Mais bien uniquement pour « récupérer » une partie de l’argent de non-résidents et donc des devises. Pour ces raisons, très hypocrites, les autorisations d’ouverture correspondaient aux seules périodes où ces non-résidents étaient censés être présents. Les établissements de thermalisme et climatique pouvaient donc être ouverts toute l’année, alors que ceux situés en station balnéaire ne pouvaient l’être que durant la période saisonnière d’une durée de six mois environ. Le Casino des Sports ne pouvait donc proposer ses tables de jeux d’argent que de Pâques à fin septembre ou octobre. UN PROJET D’HÔTEL MORT-NÉ LRS: L’autorisation des machines à sous vous a enfin permis de respirer… XH: D’abord de respirer, de boucher les trous, et de se réorganiser. Car on est resté un peu K.O debout en raison de nombreux changements à assimiler pour s’approprier ce nouveau métier. A l’issue de cette réorganisation, l’idée du projet d’hôtel a refait surface tant le besoin était criant. Certes il y avait l’hôtel Mercure, mais mon projet visait à réaliser un 4 / 5 étoiles, normes actuelles, et cela sur le terrain de l’ancien camping du Lac, à deux pas du lac de Tanchet. Malgré nos capacités financières limitées - les machines à sous changeaient toutefois la donne - nous pouvions cependant aboutir grâce à un système de défiscalisation permettant aux casinos de porter un projet hôtelier. Malheureusement, une raison administrative a retardé notre hôtel; en effet, notre autorisation de concession se terminait avant la fin des remboursements bancaires pour le dit hôtel. Une demande spéciale au ministère concerné fut donc faite, mais la réponse fut si tardive que toutes les conditions de départ étaient devenues obsolètes entre temps. Le cabinet d’architecte spécialisé avait certes été sélectionné - il transforma plus tard le Palais de Justice de Nantes et l’Hôtel Dieu de Marseille -. Mais, aucun accord unanime sur le lieu, le principe, la taille de la réalisation, ne put être trouvé au sein des différentes générations de la famille, aux tranches d’âges très diverses, ce qui rendait ce projet, pourtant abouti, très compliqué à réaliser. Ce sont là les limites des entreprises familiales… à l’italienne au sein desquelles il est difficile de s’accorder sur une même vision. LRS: Pour votre projet d’hôtel, vous ne pouviez pas vous inscrire dans des logiques stratégiques de plus grande ampleur au niveau régional ou national ? XH: Aujourd’hui il est reproché de ne plus le faire, mais à l’époque l’État travaillait avec la mise en place de Plans*. Ma mère avait été reçu par Vincent Ansquer** au Ministère du Commerce et elle avait alors lu dans un document institutionnel que la Vendée - dans le cadre du Plan - était destinée à un tourisme de masse***. * NDLR: le Commissariat général du Plan voit le jour en 1946, la planification tente d'orienter les investissements dans les secteurs prioritaires pour la croissance - En 2006 le commissariat général au Plan sera supprimé et remplacé par un Centre d’analyse stratégique. ** Vincent Ansquer fut député de la Vendée de 1962 à 1987, et aussi ministre du commerce et de l’artisanat de 1974 à 76, puis ministre de la qualité de la vie, 1976-77. *** NDLR: nous n’avons pas trouvé d’éléments à ce sujet dans les projets du Plan ou à la Datar, la Vendée ne figurant pas parmi les sites prioritaires ou stratégiques. Par contre, nous avons trouvé un Schéma d’aménagement du littoral Centre Ouest Atlantique (ALCOA) qui a été décidé par le Ministère de l’Équipement en 1971 et qui était destiné à mettre sur pied une politique destinée à promouvoir le tourisme tout en préservant l’économie, ainsi que la mise en œuvre en 1980 en Vendée du premier programme départemental d’aménagement touristique du Littoral. Un MANQUE DE VISION ESTHETIQUE LRS: Y a-t-il en Vendée un problème d’absence de vision esthétique, d’absence de prise en compte du soin nécessaire à apporter aux choses: architecture, embellissement, végétation, art de vivre… ? XH: Nantais ou Parisiens nous traitaient parfois du terme qui se voulait méprisant de « ventre à choux ». L’image de ruralité attachée à la Vendée signifiait pour eux une absence de standing et une connotation de « plouc » ce qui pouvait entraîner un certain complexe d’infériorité. En Vendée, mais en d’autres lieux aussi, on cherchait davantage à cette époque une certaine modernité à travers du béton, des néons et du formica, qu’en rénovant avec de beaux matériaux traditionnels des longères ou maisons de maître. L’attrait pour l’ancien était rare et on préférait le confort apporté par les nouveaux matériaux. D’autres territoires ont pris garde de conserver des sites dont l’architecture et les paysages sont devenus des atouts touristiques. La Bretagne, la Normandie, la Corse, la Provence, le bassin d’Arcachon, l’Ile de Ré etc.. en sont des exemples. Les rénovations mi-figue, mi-raisin, faussement « modernistes »….opérées en Vendée ne pouvaient - et ne peuvent toujours malgré des améliorations - rivaliser avec celles, pleines de charme et laissant toute leur place aux aspects historiques, que l’on peut découvrir sur l’Ile de Ré (à St-Martin, à Ars-en-ré ou à La Flotte, par exemple). Il suffit de découvrir les entrées des Sables d’Olonne pour comprendre qu’il y a de vrais problèmes en matière d’urbanisme. Difficile pour le visiteur de croire qu’il est en train d’entrer dans un endroit idyllique, dans « La Ville rêvée à la mer » ou dans une belle ville touristique. L’Association Entreprises des Olonnes, en collaboration avec la Communauté de Communes, s’était penchée il a une vingtaine d’années sur le dossier des entrées de ville. Un très beau projet en était sorti qui est sans doute resté dans un tiroir par manque de moyens financiers… Heureusement, un changement de cap commence à être esquissé depuis quelques années, un peu partout en Vendée, avec une meilleure prise en compte de la sauvegarde du patrimoine. Une nécessité, d’autant plus que certaines grandes villes vendéennes ne peuvent curieusement pas s’appuyer sur un grand nombre de demeures ancestrales. Comparons par exemple Les Sables d’Olonne et l’Ile de Ré. Nos ressources aux Sables, grâce au sel, à la pêche, aux vignes, aux conserveries de sardines, à la construction navale étaient bien plus importantes qu’à l’Ile de Ré, et nous souffrions moins qu’une île de problèmes d’accessibilité. Et pourtant, chaque ville de l’Ile de Ré compte des dizaines de belle maisons de caractères, bien plus que n’en compte Les Sables d’Olonne. De nombreux industriels et grands armateurs faisant des affaires aux Sables d’Olonne étaient en fait souvent d’origine nantaise et implantés dans cette ville. Y rapatriaient-ils tous leurs revenus, ne se souciant guère d’investir et de construire de belles maisons de maître aux Sables d’Olonne ?? Villa Tertrais-Chailley (devenue Villa Charlotte) LRS: Il reste toutefois de belles propriétés comme la Villa Tertrais-Chailley… XH: Oui, mais ça correspond à une époque plus tardive, et il y en a peu, malgré les récentes préservations ou tentatives de préservation du patrimoine. LRS: Revenons aux années 1960 / 80. Qu’est-ce qu’il manquait aux Sables d’Olonne ? Pas de banquiers, pas d’investisseurs, pas d’esthétisme, pas de vision stratégique, pas d’élus d’envergure, une soi-disant grande époque, et un tourisme de masse déplorable… C’est ce cocktail détonnant… qui a mené Les Sables d’Olonne à la stagnation, contrairement aux autres stations ? XH: Pour moi, il manquait aux Sables d’Olonne un feu intérieur ! Et ce qui n’a rien arrangé, c’est que les circonstances ont pesé sur la fréquentation sablaise. Les rares financiers et industriels qui avaient une certaine puissance financière sont allés investir ailleurs…souvent à La Baule mais aussi dans des régions et pays à la mode comme l’Espagne. D’autres, comme les proprétaires ruraux du Nord-Vendée n’ont pas pu le faire, étranglés économiquement par des blocages du prix des fermages. Sans compter les désastres liés à la conjoncture avec des pans entiers de l’industrie de la chaussure, de l’ameublement et du textile, en Vendée et dans la région des Mauges, (NDLR: de Cholet jusqu’à la Loire) qui se sont écroulés. LRS: Pendant ce temps là, que se passait-il dans les autres stations balnéaires ? XH: Le nerf de la guerre c’est bien sûr l’argent. Les personnalités politiques qui jouaient un rôle au niveau national n’oubliaient pas pour autant leur territoire. Les Guichard à la Baule, d’Ornano à Deauville, Léonce Deprez au Touquet, Borotra et Petit à Biarritz ont joué un rôle majeur pour obtenir la concrétisation d’investissements. Certes, l’élection du sablais Louis Guédon à la députation a facilité les contacts et les échanges avec les ministères. Mais auparavant, les soutiens du député-maire Pierre Mauger et du ministre vendéen Vincent Ansquer n’avaient pas été suivi d’avancées notables. Les quelques opérateurs nationaux qui se sont intéressés à La Vendée visaient plutôt une stratégie de récupération de clientèle que de songer à investir dans une logique de long terme. Le nouvel élan a été pris en Vendée à l’arrivée au pouvoir au Conseil Général de Philippe de Villiers qui s’est accompagnée d’un nouveau souffle économique sur le département. La réussite d’entreprises vendéennes, la création du Puy du Fou, le Vendée Globe ont redonné une certaine fierté à ces Vendéens qui se proclament solidaires entre eux avant tout, et qui considèrent que cette façon d’être est l’un des gages de leur réussite. Louis Guédon et Xavier Hoffmann, lors d’une cérémonie au Casino des Sports L’écart s’est creusé en matière d’équipements par rapports à d’autres stations balnéaires car nous avions le défaut aux Sables d’Olonne de ne viser que le strict minimum sans véritable ambition. Ce fut le cas pour le port de plaisance, Port Olona (notamment pour les aspects architecturaux) ainsi que pour le Palais des Congrès des Atlantes (sans même de vue sur la mer….). On a toujours eu tendance aux Sables d’Olonne à simplement tenter de rattraper le terrain perdu sans chercher à viser des réalisations de qualité, nécessaires pour donner une image touristique forte. Pour l’hôtel et sa thalassothérapie, première version, ce fut différent car la présence d’un Mercure et d’une thalasso apporta aux Sables d’Olonne une image très positive ainsi qu’une présence non négligeable dans les guides internationaux. Il faut noter que cette réalisation n’est que le fruit d’une relation amicale entre une élue au Conseil municipal et un dirigeant du groupe Accor, ce dernier ayant subordonné un accord hôtelier sur Paris avec le sultanat d’Oman à la réalisation parallèle de l’hôtel et de la thalasso sablaise. Depuis, un homme d’affaires vendéen a procédé à une remarquable rénovation de l’hôtel thalasso, le faisant monter en gamme, et envisage des réalisations complémentaires autour d’équipements de sports et de loisirs. Grands immeubles en front de mer, campings: le tourisme de masse LE TOURISME DE MASSE LRS: Sur le littoral, les projets touristiques se sont mués en projet de tourisme de masse ce qui nous a valu les constructions Ribourel et Merlin…. XH: Oui, Ribourel, et avant Ribourel il y a eu Merlin à St-Jean de Monts. Mais aussi tous les campings. Ces constructeurs nous vendaient un esprit résidence de vacances pour finalement ne proposer que de simples appartements classiques, bas de gamme. Mais il ne faut pas oublier qu’il y avait tout de même des projets en France qui avaient de l’allure et qui étaient attirants car ils apportaient des nouveautés. Prenons, par exemple, Marina Baie des Anges, Port Grimaud ou les constructions à la Grande Motte. Ces dernières avaient été conçues dans une logique d’image « new-look » avec un concept moderne, et avaient d’ailleurs attiré des investisseurs nationaux. On s’est fait un peu avoir en Vendée, je n’ai d’ailleurs aucun souvenir de contacts de près ou de loin par des développeurs proposant ce type de réalisation. Ces constructions d’immeubles gênaient les plus nostalgiques mais, à l’époque, aucune résistance ne s’était autoproclamée pour faire barrage à ces projets qui ressemblaient fort - sur le papier - aux réalisations en Espagne, faisant rêver grâce aux promesses de belles prestations communes, les pieds dans l’eau et avec des marinas. Avec le recul, force est de constater que l’immeube à proximité de la Tour d’Arundel, et les tours sur le port de pêche et sur la corniche de la Chaume ne furent construites qu’en raison d’un manque de discernement esthétique de nos élus… LRS: On a pu déceler une absence de vision stratégique à long terme pour un tourisme de qualité. Mais quelle était l’idée qui était défendue dans les années 60-70 par les élus sablais ? XH: Dans le tourisme, on est vraiment dans la caricature du maillon qui peut affaiblir une chaîne solide. Aux Sables d’Olonne et ses environs, parmi les maillons faibles il y avait au moins trois des campings existants qui jouissaient d’une image négative notamment due aux comportements déplorables de leurs clientèles. La Ville clamait sans cesse la nécessité de monter en gamme, alors qu’elle était propriétaire des campings les plus pourris qui puissent exister… LRS: Ils étaient si bas de gamme à cette époque ? XH: Oui, c’était terrible, vraiment terrible. Et la majorité des problèmes (d’incivilités ou de bagarres) que nous avions au Casino des Sports ou sur le Remblai provenait de gens issus de ces campings gérés par la Ville. Parallèlement, la Ville voulait que les professionnels fassent, eux, toujours mieux ! Il y avait une espèce d’inadéquation entre le discours de la Ville et la réalité. LRS: La clientèle de ces campings ne correspondait pas à la vision de montée en gamme que vous souhaitiez… XH: Là encore attention aux anachronismes, nous parlons bien des campings d’autrefois. Ceux d’aujourd’hui sont de vrais parcs résidentiels s’adressant à une clientèle de bon niveau. Mais sur un plan général on ne peut pas avoir toutes les clientèles ! On ne peut pas plaire à tout le monde, on peut rarement proposer des prestations au rapport qualité / prix acceptables par tous. Je me disputais sur ce thème régulièrement avec Albert Berthomé, adjoint au maire, qui venait prendre un verre au Casino tous les dimanches à la fermeture de son stand de tir, et avec lequel nous refaisions le monde du tourisme sablais… Au Casino des Sports, nous avions la volonté à la fois de monter en gamme et de compléter notre clientèle assez jeune par des tranches d’âges plus aisées; plutôt que de n’avoir que des jeunes, on cherchait à fidéliser aussi leurs parents quinquagénaires ! Le jeu de la boule au Casino des Sports dans les années 80 LRS: Les uns d’un côté au Sand’s, les autres au Pub… et les salles de jeux d’argent au milieu… XH: Oui, en simplifiant c’était ça, sans oublier le club de tennis, premier club en Vendée où s’adonnait à son sport la « gentry » vendéenne et estivale. Grâce à cette population tennistique, nous avions tissé un réseau relationnel de qualité. Cela se perpétua avec les membres des générations suivantes qui venaient s’amuser, écouter de la musique et danser dans nos deux fleurons, le Sand’s et le Pub. Bon nombre d’entre eux sont devenus des décideurs vendéens. UNE MONTÉE EN GAMME QUI EST AMORCÉE LRS: Cette montée en gamme aux Sables d’Olonne dont tu parles souvent et que tu prônes, est-elle toujours bloquée dans le cahier des doléances ou a-t-elle été amorcée ? XH: Nous assistons, fort heureusement, depuis une dizaine d’années à une montée en gamme et à un retour en grâce des Sables d’Olonne auprès de grands industriels et d’entrepreneurs de l’économie des services après des hauts et des bas dans l’historique touristique sablais que l’on peut présenter, de manière simplifiée, en six périodes: - avant guerre: « un air de Belle Epoque » (c’était…avant); - 1939/45: « la parenthèse »; - 1945/65-70: « un automne en pente douce » (du sur place avec les mêmes); - 1965-70/85-90: « le K.O debout » (une certaine immobilité face au dynamisme des autres stations); - 1985-90/2000: « la remontada »; - depuis 2000: « une nouvelle dynamique ». On est parti de loin puisque entre 1965 et 90 environ, l’image des Sables d’Olonne n’était pas au beau fixe malgré les images de cartes postales montrant une belle plage ensoleillée. Manques d’équipements, manque d’envergure et d’ambition, absence de projets prestigieux, incivilités pratiquées par des groupes estivaux logeant dans des campings… Les Sables d’Olonne, la plage des familles De plus, si certains voyaient comme un atout le caractère familial des Sables d’Olonne avec ses pensions de famille et une plage parfaite pour les petits enfants, pour d’autres cette expression de station familiale avait une connotation négative, totalement exagérée, signifiant que l’on y voyait davantage de personnes de condition simple que de gens portant beau, à la prestance élégante, et habitués des bonnes manières. Je me souviens que lors d’un rendez-vous avec le directeur du développement d’une grande société de résidences de tourisme, celui-ci m’avait déclaré en faisant la moue: « Oui, Les Sables, c’est connu, mais un peu familial, non…!? » ce qui signifiait expressement une fin de non-recevoir avant même d’avoir débuter la discussion pour un éventuel projet… Quant à l’expression souvent entendue à cette époque, « Les Sables d’Olonne ! Ah oui, j’y allais quand j’étais petit », on ne sait si elle signifiait que son auteur gardait de très bons souvenirs de cette merveilleuse station ou s’il avait préféré par la suite aller en des lieux plus à la mode… Oui, depuis nous assistons à une montée en gamme car beaucoup de choses ont changé aux Sables d’Olonne, mais il reste encore du travail… Au fil des décennies, de nombreux campings bas de gamme ont été supprimés. Ensuite, on est aidé en Vendée par des éléments conjoncturels: des vacanciers quittent la Côte d’Azur, saturée, trop chère, avec une chaleur difficilement supportable pour des personnes d’un certain âge. Et sur d’autres littoraux que la Vendée, le prix des habitations est devenu excessif ! De nouveaux résidents sont venus chercher sur le littoral vendéen une qualité de vie appréciable et des prix, bien qu’en augmentation permanente, encore abordables en comparaison avec d’autres régions. Du même coup, on retrouve une clientèle plus aisée qui était le cœur de cible de notre station entre la fin du 19ème et le début du 20ème siècle. Cet afflux d’une nouvelle génération de clientèle, et le renouveau qui l’accompagne, permet l’implantation de nouveaux commerces et le lancement d’investissements importants, chose impossible auparavant. Parallèlement, de jeunes couples, moins argentés, achètent aux Sables d’Olonne des maisons et les relookent avec du charme, redonnant vie à des rues qui étaient jusque-là assez insipides. Façade du Casino des Sports rénové, de type Louisiane LRS: Pour qu’ils se sentent bien ici, quelles transformations ont été réalisées ? XH: Si un seul équipement aussi qualitatif soit-il ne peut pas changer l’image globale d’une station balnéaire, un ensemble cohérent le peut. Les années 1990 / 2000 - celles de la fameuse « remontada » - ont connu bon nombre de nouveautés. Citons par exemple le Mercure Thalasso, les deux premiers Vendée Globe (1989, 1992), la rénovation du champs de courses hippiques avec des retransmissions télévisuelles, le TGV (tracté puis normal), l’agrandissement de Port Olona, l’autoroute jusqu'à la Roche-sur-Yon puis la 4 voies jusqu’aux Sables, le Centre Les Atlantes avec ses congrès et spectacles, le développement du Zoo depuis sa reprise en 1975, la qualité reconnue de la rénovation du Casino des Sports à laquelle je suis fier d’avoir participé, la rénovation du Remblai, la transformation de certains hôtels. Notons aussi le plan de rénovation des façades des immeubles et maisons initié par la Ville. L’émergence d’entreprises telles les Milcendeau, Océa, AMP Visual, ShowRoomPrivé, l’éclosion et le développement du Puy du Fou et les perfomances de nos industriels ont marqué les esprits et ont participé au changement d’image et de réputation, tant de la Vendée que des Sables d’Olonne. L’OBSESSION PERMANENTE DU TOURISME LRS: Élargissons à l’ensemble du littoral ou de la Vendée. Comment juges-tu la politique actuelle qui fait du développement touristique une volonté permanente, certains diraient même obsessionnelle ? On commence à voir poindre des contestations: marre du tourisme à haute dose, envahissement, pollution…. En réponse à ces critiques, les élus se défendent, assurant être obligés d’agir ainsi pour la création d’emplois. De jeunes Sablais dénoncent aussi l’impossibilité dorénavant de se loger dans leur ville d’origine en raison des prix atteints dans l’immobilier. XH: J’ai joué un rôle certain dans le tourisme sablais et aussi à la Chambre de Commerce où lors de nos réunions mensuelles il n’était pas rare que les représentants des ports réclament qu’on en face un peu moins pour l’industrie et les industriels. Et ces derniers trouvaient qu’on en faisait un peu trop pour les ports et le tourisme… Ces réactions montrent qu’à part un peu de marketing, de ciblages en matière de communication, aucune véritable stratégie, avec des objectifs précis et des moyens adaptés, n’avait été mise en place. Pour cela, il faut un leader professionnel incontesté maîtrisant les produits touristiques et capable de mettre en place cette stratégie incontournable. Le Club Med, Pierres et Vacances, le groupe Barrière, le Puy du Fou, ou les Disneyland ne fonctionnent qu’avec de grands spécialistes en tourisme, marketing et avec l’aval de financiers. En l’absence de ce leader, ce sont finalement des Collectivités locales, qui ont rarement les compétences les plus abouties, qui prennent ces dossiers en charge. Les consensus politiques mous, affadis par les pressions égoïstes de commerçants et de divers intervenants, finissent par conduire à des projets peu pertinents. Alors que les problématiques sont nombreuses, et nécessitent des prises de décisions adaptées: montée du niveau de la mer, surdensités, prix des logements, niveau des équipements, sécurité, écologie, transports etc… Ce qui est intéressant, et nous l’avions ébauché dans les années 1990, c’est de travailler sur une territorialité plus large. Nous avions posé ce principe alors même que la fusion au Pays des Olonnes n’était pas réalisée et qu’il n’y avait pas de Communauté d’Agglomération existante. Le Syndicat d’Initiative disparu, l’Office de Tourisme étant municipal, il était contraint de limiter ses actions à la Ville des Sables d’Olonne. Nous avions alors créé « Club du Tourisme » et souhaitions collaborer avec Talmont-St-Hilaire et St-Gilles-Croix-de-Vie sur des idées communes en matière de tourisme. LRS: Alors, y a-t-il d’autres voies que celles, classiques, que développe Les Sables d’Olonne: courir après les autres pour ne pas perdre de terrain, selon tes termes ? XH: Le projet étudié à l’époque avec cette idée de « La Ville rêvée à la mer » pouvait avoir l’intérêt de changer radicalement de paradigme. J’estime qu’il faut choisir entre, d’une part, être une petite ville qui se doit de recevoir et de contenter beaucoup de touristes, et d’autre part une ville à vivre et à travailler, la plus agréable possible, pouvant recevoir des visiteurs d’une manière équilibrée. FAIRE LE CHOIX D’UNE REGULATION ? LRS: Ce que tu vises c’est une sorte de régulation ? XH: La population est attirée par le littoral. Dans les grandes villes françaises, le prix du mètre carré est très élevé. Certains viennent vivre sur le littoral pour profiter de conditions plus agréables. Près de 50.000 habitants aux Sables d’Olonne, c’est énorme. Et sans doute 5 fois plus durant l’été. Et c’est bien là l’un des problèmes: le tourisme de masse nécessite des équipements touristiques collectifs très coûteux, par exemple de grands parkings etc… Pour une utilisation à plein pendant 100 jours par an, tout au plus ! Cela n’a aucun sens d’investir autant pour de si courtes périodes, et la plupart des établissements commerciaux permanents ne sont pas calibrés pour juguler ces pics. La Ville des Sables d’Olonne n’a pas la capacité à accueillir toujours plus de monde: d’abord elle est configurée en demi-cercle, ensuite la plage de sable et sa promenade ne sont pas si grandes, et le centre-ville est une presqu’ile. Les zones protégées telles Natura 2000 ainsi que la présence d’une forêt domaniale et de marais, rendent les expansions quasiment impossibles. Disons-le haut et fort: nous avons peu d’espace ! Et tout le monde s’accorde aujourd’hui pour dire que point trop n’en faut ! Les critiques commencent à se faire entendre sur les conditions - étouffantes - ressenties par la population durant les pics saisonniers. Alors qu’en régulant en quantité la clientèle, on pourra mettre à disposition des équipements de meilleure qualité, tout en étant adaptés au nombre de clients désirés. C’était, et c’est toujours, une anomalie totale de vouloir couvrir une gamme de clientèle la plus large possible. Réguler les accès aux plages ? LRS: Explique-nous de manière plus détaillée ton raisonnement. XH: Pour moi, le meilleur touriste c’est celui qui habite ici 365 jours par an….. Les clients souhaitent des systèmes d’accueil performants et ne pas être éloignés des lieux à atteindre. Il leur faut des parkings souterrains, des transports aisés, des services publics proches etc… Tout cela est de de plus en plus coûteux, complexe, compliqué. Et il n’est pas raisonnable d’accepter de prendre en charge les écarts saisonniers : créer et dépenser pour 1000 personnes quand seulement 150 personnes l’utiliseront sur l’année ! Ces écarts sont de moins en moins acceptables sur le plan écologique. La problématique des pics saisonniers, c’est aussi les problèmes de pollution des transport: peu de temps sur place et l’utilisation de transports émetteurs de gaz à effet de serre. En Suède, les gens qui prennent l’avion commencent à être montrés du doigt… Le tourisme balnéaire va être confronté à des problématiques similaires. Les plages, selon les estimations et nos propres constatations vont voir leurs capacités d’utilisation et d’accueil diminuer. Si les craintes se concrétisent, il faudra bien réguler leur utilisation qui sera de plus en plus restreinte. Et, sans doute, trouver un moyen de privilégier ceux qui apportent quelque chose à notre Ville des Sables d’Olonne: les contribuables et les touristes consommateurs. Tout en arrivant à la logique suivante qui est une évidence: faire payer les accès aux plages afin de les préserver, tout en permettant ainsi d’améliorer la qualité des services fournis. L’image globale de la ville en sortira grandie. LRS: Faire payer la plage des Sables d’Olonne pour la préserver ?? XH: C’est une formule radicale mais assez simple à mettre en place, avec des gratuités et des tarifs réduits pour différentes catégories. C’est ce qui existe avec les parcmètres avec des tarifs différenciés selon que l’on est résident ou visiteur, c’est aussi ce qui a été mis en place pour les navettes du passeur vers La Chaume. Ce n’est qu’un juste retour pour les résidents à l’année et propriétaires qui payent des impôts et des taxes permettant la prise en charge de dépenses municipales. Or, à l’extérieur de la Ville, campeurs et campings ne participent pas vraiment financièrement à toutes les charges qui incombent aux Sables d’Olonne pour organiser, sécuriser, nettoyer la commune. Les campings cherchent à capter le maximum des dépenses loisirs de leur clientèle, selon un « business modèle » bien élaboré. Et leurs clients, les campeurs, viennent profiter des plages sablaises, se promener sur le Remblai, profiter de spectacles gratuits, de feux d’artifice etc… sans apporter une contribution notable en matière de dépenses. Faire payer les accès aux plages rééquilibrerait les dépenses municipales contraintes. LRS: (sceptique) Mais l’état d’esprit n’est pas à cela. Il y aurait une levier de boucliers si on instaurait cela. Ce serait considéré comme une forme d’atteinte à la liberté d’aller et venir. Aujourd’hui en tout cas. XH: Pour moi c’est l’évolution en cours. Certaines grands villes touristiques de par le monde commencent à limiter le nombre de touristes. Il y a un vrai problème de cohérence en la matière car, je le répète, on ne peut pas tout faire, tout couvrir… Au regard des évolutions, il est probable que la Grande Plage des Sables d’Olonne et celle de Tanchet ne seront bientôt utilisable qu’à mi-temps si on souhaite les préserver. Je dénie la logique tourisme et rappelle que l’on doit suivre une démarche économique tout simplement. Pourquoi participer à des salons de tourisme ? Pour aller chercher de la clientèle pour les 14 juillet et 15 août ? Aucun intérêt ! Ce qu’il faut c’est proposer des prestations toute l’année, proposer des spectacles de qualité durant les fêtes de Noël etc… Les choses bougent dans le bon sens, il faut persévérer. Pour le classement des stations, il y a des catégories : « thermale », « climatique » et « balnéaire ». Nous devons aller vers le modèle « climatique », avec du monde tout le temps, un maximum de résidents à l’année. Voilà la logique. Le modèle « balnéaire », on ne peut plus se le permettre ! LRS: Il n’y a pas que juillet et août qui font l’objet d’une politique promotionnelle. Les Offices du Tourisme et Vendée-Expansion, organisme chargé en Vendée de la promotion du tourisme, travaillent beaucoup sur le développement touristique auprès des clientèles d’affaires afin d’élargir les périodes sur les ailes de saison, c’est-à-dire avril-juin et septembre-octobre. XH: Je considère pour Les Sables d’Olonne qu’il faut développer toutes les activités et animations afin de donner le plaisir de vivre à l’année. C’est l’idée de « La Ville rêvée à la Mer », qui a été utilisée malheureusement comme slogan lors des municipales alors que ce n’était pas un slogan mais une base de réflexion stratégique. L’idée de départ était d’être en ville, mais en bord de mer et encore plus agréable si possible qu’à Nice, grâce à une plage de sable et tout en profitant de l’intérêt d’une ville à dimension humaine. Je pense qu’il ne faut pas que l’on sorte de cette logique de résident à l’année - pour des raisons économiques - et de « Ville rêvée à la Mer » avec des activités, des loisirs, des distractions variées et à l’année. Il faut arrêter d’avoir la plage comme seul horizon ! « La Ville rêvée à la mer » n’enlève pas le côté touristique mais le minimise ; « une résidence secondaire de retraité de moins pour une résidence d’actifs à l’année de plus », c’est quand même, mine de rien, un peu dans l’air du temps. (NDLR: Le projet de « La Ville rêvée à la mer » visait à passer du statut de station balnéaire à celui de ville maritime, un peu comme le sont La Rochelle, Biarritz ou St-Malo. Une évolution vers une ville maritime moderne tout en préservant son environnement et son patrimoine. ») LRS: On est dans une vision très sélective des choses…. XH: On doit s’appuyer sur une logique économique, de gamme, et être cohérent par rapport à la gamme choisie. Je n’oublie pas les notions sociales ou humaines, les états d’esprit. Mais je m’en réfère toujours à la chanson de Michel Jonasz et Pierre Groz, « Les vacances au bord de la mer » : « On suçait des glaces à l’eau, Les palaces, les restaurants, On ne faisait que passer d’vant… » Cela me rappelle aussi l’époque des grandes vedettes au Casino des Sports, où je me sentais gêné car il y avait à l’extérieur des fans qui n’avaient pu s’offrir de places et qui espéraient juste voir passer leur artiste préféré. Faire un choix de clientèle, considérer qu’on ne peut satisfaire toutes les gammes, ne doit pas être regardé comme de la sélection à outrance où seuls les émirs et les oligarques auraient droit de cité. Une très grande frange de clientèles intermédiaires ou aisées correspondrait à la cible souhaitée pour notre ville, en totale fidélité avec notre histoire touristique. Je reste convaincu que chacun doit aller dans la station la plus adaptée à ses goûts et à ses finances. Pour beaucoup, et c’est le cas pour moi, il n’y a aucun intérêt à se retrouver dans des endroits people ou « collet monté », si on n’y prend pas plaisir, si cela n’est pas conforme à notre état d’esprit et à notre façon d’être. Je ne me sens pas humilié de ne pas vivre sur la Côte d’Azur ou en Sardaigne. Pas davantage de ne pas participer à des concours stupides de douche au magnum de champagne. On peut passer des moments très agréables dans des lieux simples, à la portée de nombreuses bourses, sans avoir l’impression d’un déclassement social insupportable. LRS: On n’en est pas encore aux batailles de magnums sur le Remblai ou la plage des Sables d’Olonne… XH: L’objectif n’est pas la sélectivité à tout prix, mais de s’appuyer sur une cohérence qui consisterait à privilégier ce que souhaitent à la fois les résidents et la clientèle touristique visée. Ce sera une façon de réduire les flux excessifs et perturbants n’ayant pas de raison d’être, d’une clientèle qui n’est pas vraiment en osmose avec l’âme de notre ville. LRS: Tu es vraiment convaincu que c’est un mouvement qui se crée et qui pourrait se généraliser ? XH: C’est un chemin à prendre car il y a des situations où ce n’est plus supportable, où l’on est parfois trop nombreux pour un événement culturel ou pour profiter d’une plage. Quel plaisir à attendre plusieurs heures pour se retrouver dans une salle bondée pour admirer un tableau de maître dans une grande exposition ? Quel intérêt à aller chercher des clients pour remplir encore davantage le cœur de la saison estivale alors que l’on n’en a finalement pas vraiment besoin ! Gérons déjà au mieux les surplus estivaux non souhaités et investissons dans des animations, des spectacles, des loisirs, dans la qualité de vie, mais tout au long de l’année afin que chacun ait envie de vivre aux Sables d’Olonne à l’année et non de manière ponctuelle. Et même si des efforts en la matière sont déjà faits, persévérons pour attirer surtout des personnes encore actives plutôt que nos anciens. UN AXE LA ROCHE-SUR-YON / LES SABLES D’OLONNE ? LRS: Les grands axes à privilégier aujourd’hui et demain pour Les Sables d’Olonne, quels sont-ils? XH: Pour compenser la présence de nombreux retraités, on doit impérativement s’orienter vers une population de jeunes actifs, mettre à disposition des filières après-bac, et faciliter l’installation professionnelle. Il serait bien de pouvoir proposer des emplois en lien avec des spécialisations comme la nouvelle économie. On a la chance d’avoir 40 développeurs aux Sables d’Olonne avec Showroomprivé. Il faudrait poursuivre sur ce genre de créneau aux Sables d’Olonne, tenter de développer les emplois de cadres dans les secteurs de la technologie et de la nouvelle économie. Et éviter les usines qui colleraient mal avec l’image souhaitée pour Les Sables d’Olonne. C’est pourquoi personnellement je n’ai jamais été favorable à l’installation d’usines aux Sables d’Olonne. LRS: Pourtant les élus ont toujours regretté d’avoir laissé partir entreprises et usines à La Mothe-Achard. Pour eux cela aurait été un vecteur de développement pour Les Sables d’Olonne. XH: D’abord pas tous, et pour moi les autres ont tort. Que des entreprises créées aux Sables d’Olonne aient migré à la Mothe-Achard a pu agacer, mais j’estime qu’il faut plutôt s’en féliciter. D’abord, sur les Sables même, il n’y a pas de foncier disponible à des coûts raisonnables pour des entreprises industrielles qui ont besoin d’espace notamment pour leur stockage. Ensuite, il ne m’apparaît ni judicieux ni esthétique que notre petit territoire touristique soit parsemé de palettes et de produits pré-emballés sous plastique. S’il n’y avait pas eu La Mothe Achard, ces entreprises auraient dû s’expatrier bien plus loin et Les Sables d’Olonne aurait souffert de l’absence de ces salariés et cadres qui participent à la vie de notre cité. Il faut enfin rappeler que si elles se sont installées à La Mothe-Achard, c’est que les trois communes du Pays des Olonnes n’ont alors pas su faire coïncider les besoins en foncier de ces entreprises avec leurs propres projets de zone industrielle. Il faut par contre saluer l’existance du site d’Actilonne, avec des entreprises de services, une réalisation initiée par la Communauté de Commmunes du Pays des Olonnes et à laquelle l’association Entreprises des Olonnes a participé. Tout comme on peut se féliciter du lancement de Numerimer qui est une belle et performante réalisation. Ces deux créations correspondent pleinement à l’image que l’on doit donner d’une « Ville rêvée à la mer ». Mais des usines, avec les cagettes ou les palettes dans tous les coins, je préfère que ce soit à La Mothe-Achard qu’ici ! LRS: Oui, mais tu aurais une entreprise comme PRB ici, ce serait pas mal….? XH: Franchement, je suis content qu’ils soient là-bas, et visuellement je ne vois pas d’endroit où elle aurait pu s’installer au Pays des Olonnes. Maintenant, il n’y a même plus la taxe professionnelle donc l’intérêt reste minime. Déjà, toujours visuellement, je ne suis pas ravi qu’à l’entrée d’une ville qui se veut une « Ville rêvée à la mer » on ait disposé un hôpital et une clinique. A l’inverse je suis favorable à la création d’un axe économique fort avec La Roche-sur-Yon. Si on veut réfléchir pour demain ! LRS: Une grande voie économique Les Sables d’Olonne / La Roche-sur-Yon ? XH: Oui car La Roche-sur-Yon devient une vraie capitale; ils ont été ronronnants pendant des années mais il y a désormais un nouveau souffle. Alors Les Sables d’Olonne serait peut-être le numéro 2 de l’alliance mais pourquoi se priver d’une telle possibilité sur le plan de l’économie traditionnelle ? Ensuite, il suffit de mener une stratégie à deux en réfléchissant aux pôles qui sont les plus à même d’être développés dans l’une des villes, en tenant compte de la pertinence et de la symbiose recherchée, et en fonction du site et de l’environnement. Site PRB UN RÔLE POLITIQUE ? LRS: Tu as repris la direction du Casino des Sports vers 1980 / 85. Est-ce que tu n’a pas envisagé de jouer un plus grand rôle au sein de la Ville et pourquoi pas un rôle politique ? XH: Cela ne s’est pas produit, pour deux raisons: il y a fort longtemps je faisais partie d’une des listes au Château d’Olonne, mais nous n’avons pas été élus. Et plus tard, j’avais été contacté par une future tête de liste sur Les Sables d’Olonne pour mettre en oeuvre, à partir de mon expérience entrepreneuriale, des gestions de projets. Mais n’ayant pas eu suffisamment le champ libre pour appliquer ce projet, j’ai préféré couper court à ce début d’expérience politique. Sur le plan purement politique, le fait que le Casino des Sports était sous-délégataire de service public rendait aussi les choses un peu compliquées. Cela dit, il y a plus d’une façon de faire de la politique au sens gestion de la cité. J’ai toujours été très impliqué et le suis encore dans des instances mixtes. J’apporte mon expérience et, en échange, cela me donne pleinement satisfaction. J’y suis beaucoup plus à l’aise et cela m’évite les inconvénients des représentations politiques, extrêmement énergivore et chronophage. LRS: Certes, il y a des cérémonies, mais le rôle de maire est très varié et exigeant, d’autant plus que la gestion d’une ville s’est complexifié. Il agit, suit des dossiers d’une grande importance, doit arbitrer, prendre des décisions, faire de la prospective, envisager des stratégies, coordonner de nombreux dossiers… Il est désormais nécessaire d’avoir un bagage culturel, économique, juridique… Par contre c’est vrai que c’est très prenant. XH: Oui je suis d’accord. J’ai fait un choix, aujourd’hui j’essaye seulement d’apporter ma contribution. Comme beaucoup de personnes je ne vois pas quel est le sens métaphysique de la vie, par contre il me paraît important d’être utile au système en essayant de le faire dans les conditions les plus élégantes possibles. En plus de vouloir être utile, je ne peux pas me limiter à un seul centre d’intérêt aussi passionnant soit-il; j’ai besoin d’intergénérationnel, j’ai besoin d’interactions, j’ai besoin de m’enrichir auprès des autres, et à mon tour d’essayer de les enrichir - par exemple dans des clubs de créateurs-repreneurs d’entreprises - en leur apportant un éclairage à propos de sujets que je maîtrise. C’est semble-t-il, pour ceux que j’accompagne ou avec qui je travaille, une petite musique qui leur convient. Mairie des Sables d’Olonne APRÈS LA VENTE… UN NOUVEL HORIZON LRS: La famille Hoffmann a vendu le Casino des Sports. Quelles sont aujourd’hui tes activités ? Pour des raisons fiscales, on est souvent obligé de réinvestir. As-tu gardé des parts dans des casinos, ou dans des organismes de loisirs ? XH: Le Casino des Sports a été vendu en 2006 et, compte tenu de l’accord avec Joa Casino, je l’ai quitté fin 2008 à l’âge de 57 ans. Un âge un peu tardif pour me relancer dans un projet, et insuffisant pour n’avoir comme seule ambition que de pantoufler. En 2006, j’avais déjà passé 20 ans à la Chambre de Commerce et 15 ans à l’Association Progrès du management (APM - une vingtaine de chefs d’entreprises qui se réunissent tous les mois). Je m’étais aussi impliqué dans différentes organisations venant en aide à la création et au développement des entreprises: lors de ma présidence d’Entreprises des Olonnes, sur une idée de Marc Shoentgen, DG de la Communauté de Communes, nous avons créé la section locale d’Initiative France. J’ai aussi participé à la création de la section vendéenne du Réseau Entreprendre ainsi qu’à Ruptur et Arcane. Toutes ces activités bénévoles m’ont conduit, toujours dans le but d’essayer d’être utile, à participer à de nombreuses rencontres fort intéressantes avec des professeurs de grandes écoles, des experts en économie et marketing, des auteurs, des patrons de syndicats, des sociologues etc… et menant à des échanges humains et enrichissants entre pairs. Ces nouvelles expériences m’ont permis d’avoir un nouveau regard sur la gestion d’entreprise. Parallèlement, j’ai intégré une association de business angels, ABAB, dont le but poursuivi est d’aider des starts-up, généralement lié au web. Et aussi un fonds particulier, porté par des professionnels de la finance mais dont le suivi est réalisé par des chefs d’entreprises. Les sommes investies visent à aider un ou des cadres dans la reprise de leur entreprise. ET EN MÊME TEMPS… (Note de la Revue : les questions ci-dessous datent d'octobre 2020) LRS: Politiquement tu te situes dans un courant ou pas du tout ? Plus à droite qu’à gauche…? XH: Dans un monde aussi complexe que celui d’aujourd’hui, penser binaire me parait complétement délirant, comme de vouloir choisir entre performance économique et avancées écologiques. Je suis donc très, très Macron quand il s’exprime en utilisant le terme « et en même temps ». (NDLR: dans la pensée de Macron, le « en même temps » signifie la prise en compte de principes qui paraissaient opposés, une sorte de synthèse ou d’arbitrage en évitant le conflit; ses adversaires jugent plutôt cela comme un positionnement politique flou). Je pense qu’aujourd’hui les problèmes sont d’une complexité rare, et nous sommes confrontés tous les jours à des problèmes écologiques. Et donc, chercher sans arrêt des coupables plutôt que des solutions me paraît dramatiquement dangereux. Mais parfois on complexifie les problèmes à outrance, sans aucune raison : par exemple, avec l’institution de normes comme une fin en soi, surtout si l’on n’a pas pesé suffisamment le pour et le contre, quelle que soit la norme. Prenons, aux Sables d’Olonne, les rambardes du Remblai et les passerelles pour handicapés sur la plage : je suis outré qu’autant d’intelligence puisse mener à ce genre de choses. LRS: Les lobbies sont souvent en cause… XH: Oui parfois, mais là ce ne sont même pas les lobbies c’est la bien-pensance actuelle, le politiquement correct. Des bobos ! Même en 1968 la mentalité de ces petits « bourgeois-catho » - extrêmement conformistes et qui ont participé, me semble-t-il, pleinement aux évènements - ne menait pas à autant d’agressivité lorsqu’on avait des avis divergents. Aujourd’hui, on est tout de suite le « porc » de quelqu’un… LRS: Revenons à Emmanuel Macron. XH: Il y a deux bouquins qui m’ont très intéressé car c’est exactement l’esprit de Progrès du Management (APM). Il y a Révolution d’Emmanuel Macron (NDLR: paru en novembre 2016 - Ancien ministre de l’Économie et candidat à l’élection présidentielle, Emmanuel Macron raconte, pour la première fois, dans Révolution, son histoire personnelle, ses inspirations, sa vision de la France et de son avenir, dans un monde nouveau qui vit une « grande transformation » comme il n’en a pas connu depuis l’invention de l’imprimerie et la Renaissance. Un livre fort, singulier, qui pose les fondements d’une nouvelle société). Et un autre rédigé par David Amiel et Ismaël Emelien*, qui ont fait partie de son cabinet : Le Progrès ne tombe pas du ciel. S’ils réalisaient et mettaient en place ce qui est contenu dans ces deux livres, je serais extrêmement satisfait ! Mais, malheureusement, en politique il y a tellement de contraintes et d’injonctions paradoxales**. * David Amiel est un ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure (Ulm). En 2015, après un séjour de recherches à l'université de Princeton aux Etats-Unis, il rejoint Emmanuel Macron, alors ministre, comme économiste. Pendant la campagne présidentielle, il coordonne l'élaboration et la rédaction du programme. Il est nommé en mai 2017 conseiller du Président de la République. Ismaël Emelien a travaillé dans le secteur privé et dans un think-tank. Il est devenu conseiller d'Emmanuel Macron au moment de son entrée au gouvernement comme ministre de l'Economie, en 2014. Comptant parmi les fondateurs d'En Marche, puis directeur de la stratégie de la campagne présidentielle d'Emmanuel Macron, il a ensuite été nommé conseiller spécial du Président de la République. ** Injonctions paradoxales: le but consiste à placer une personne entre deux obligations contradictoires en cherchant ainsi à court-circuiter le libre arbitre de la personne, en tentant d’obtenir d’elle ce qu’elle ne souhaite en fait pas effectuer. Dans l’esprit général et dans le discours préalable de Macron je suis macroniste, c’est-à-dire que je suis un humaniste, je n’ai pas envie de voir les gens dans la déchéance, mais je suis un libéral car je suis pour l’économie de marché, mais raisonnée. Je suis un « raisonné » malgré mon côté passionnel, qui me fait être suspecté d’être plein de certitudes, alors que je ne fais que défendre des convictions plutôt réfléchies, mais avec passion. Suite à l’élection de François Mitterrand à la présidentielle de 1981 et en raison de cette élection, j’ai pris ma carte au RPR en 1983 car j’avais compris qu’un parti politique se devait d’avoir une base multi-culturelle et multi sociale, ce qui n’était pas le cas de l’UDF, pourtant plus proche de mon état d’esprit. J’approuve Emmanuel Macron, dans son raisonnement, dans ses déclarations préliminaires. Et si ces lignes directrices avaient été mises en place alors je resignerais tout de suite. Malheureusement…. il est un peu décevant… comme Sarkozy l’a été aussi. Comme pour le tourisme, il ne faut pas faire de promesses qui ne soient pas réalisables. LRS: C’est difficile de mettre en place des actions libérales, on l’a vu c’est très mal accepté, considéré comme des cadeaux au patronat ou aux riches… XH: Emmanuel Macron a raté des tas de choses concernant le « et en même temps »…. Pour l’ISF il avait raison, mais il aurait dû mettre le pendant tout de suite. De nombreuses choses importantes au début de son mandat ont été ratées et désormais il le paye… Mais sur le discours et l’idée générale, je suis macroniste. Il y a des choses qui m’insupportent, les choses sont très compliquées: gueuler ou mettre quelqu’un au pilori ça sert à rien, l’important c’est de résoudre le problème. QUELLES LECTURES ? LRS: Tu lisais beaucoup, est-ce toujours le cas ? XH: Je lis beaucoup. Surtout des essais, et quand c’est de la littérature elle doit m’apprendre quelque chose. J’aime bien Jean-Christophe Rufin, Sylvain Tesson, certains Houellbecq. J’aime bien les romans qui ouvrent des pans sur la sociologie, la philosophie. J’aime aussi Ken Follett en raison des contenus historiques. J’aime bien me nourrir de ces aspects mais les livres de littérature classique ou même certains "grands Prix" avec des histoires alambiquées et parfois sordides m’emmerdent. En fait j’aime tout ce qui touche à l’interaction de l’humain et à son environnement: donc je peux passer de la sociologie à l’anthropologie, de l’ethnologie à l’histoire et à la politique, et évidemment à l’économie. Mais encore faut-il que les contenus, bien que techniques, soient suffisamment abordables. Parmi mes dernières lectures, un trio macro-économique, Branko Milanovic, Esther Dufflot et le dernier Thomas Piketty. Et je recommande les trois Noah Harari. Depuis 2 ou 3 ans, je me suis aussi intéressé à des ouvrages de vulgarisation sur les neuro-sciences, sur la physique et mécanique quantique. La nature reste très étonnante et tous les champs des possibles sont bien loin d’avoir été cernés. QUELQUES QUESTIONS DE SOCIÉTÉ… LRS: Que penses-tu de la mondialisation, et du problème de pouvoir d’achat des Français alors que certains pensent que le Smic est déjà trop cher ? XH: Certains auteurs semblent démontrer à travers leurs ouvrages que la mondialisation, et l’économie de marché qui y est associée, ont été avec le recul globalement positives. Cependant, malgré la contribution des classes moyennes des pays développés, les plus pauvres installés dans les pays du sud n’ont pas suffisamment profité de cette évolution. Il faut regretter une fois de plus les distorsions trop criantes constatées, avec des profits en faveur des plus riches, ceux dont la fortune est déjà proche de l’obscénité. Cela dit le système communiste n’a jamais été une bonne alternative, quel que soit le pays où il a été implanté. Les échanges commerciaux ont toujours existé, depuis la nuit des temps. Limiter la mondialisation me paraît bien utopique alors que les instances mondiales - ONU, l’OMC, l’OCDE - peinent à faire entendre leurs voix. Quant au projet de rééquilibrer un tant soit peu les richesses mondiales et les revenus cela paraît aussi très difficile à obtenir, même pour un faible pourcentage de transfert, plus ou moins 1%. Une des pistes pourrait être, d’abord, d’éviter de stigmatiser les plus riches, et ensuite d’arriver à les rendre fiers de participer à l’effort collectif. Agir sur l’évasion fiscale et tous les paradis fiscaux serait aussi une évolution souhaitable favorisant la redistribution. LRS: Et l’Europe et la Commission européenne, c’est une chance ou un boulet ? XH: Les deux. Je ne peux pas trop croire revenir à la pure souveraineté nationale compte tenu des besoins du multilatéralisme, mais quand on voit la souris dont a accouché la montagne. Je trouve que ça manque de…vision. Je ne vois pas en Europe ce que l’on veut nous vendre. Depuis le charbon et l’acier, je peux comprendre que l’on soit passé à l’économie pure et à l’euro mais ils auraient dû « en même temps » - on revient au macronisme - instaurer un minimum d’équité en matière fiscale et en matière sociale. Et le problème de l’agrandissement européen ! Pourquoi cet agrandissement, aussi vite alors que l’on n’avait même pas régler nos propres problèmes (des premiers pays) ? LRS: Philippe de Villiers disait qu’avant le Vendée Globe, les littoraux et les gens du bocage n’arrivaient pas à s’entendre. Ils se foutaient sur la gueule et il paraît - même s’il exagèrait un peu - que depuis qu’il y a le Vendée Globe les gens du bocage ont un peu plus de respect pour les gens du littoral. XH: Que le Vendée Globe ait participé à ce rapprochement, la réponse est certainement oui, mais si le Vendée Globe a pu exister c’est grâce aux industriels vendéens qui y ont mis de l’argent et qui ont été en même temps des interlocuteurs pour les gens du bocage. LRS: Dernière question à propos du mille-feuilles français. Faut-il garder les départements ? XH: En tant que Français je dis non. En tant que Vendéen je dis qu’il faut réfléchir… Je vois bien les actions que mène le département. Il y a une certaine cohérence à avoir un interlocuteur de proximité. Le niveau de la Région… c’est bien lointain. Il faut tenir compte des questions d’identité. Avec la Loire-Atlantique on est différents mais cousins. Alors, une nouvelle Armorique ? La Vendée c’est compliqué, on a fait partie du Poitou… Le maraîchin de Challans ce n’est pas du tout le même que celui du Marais poitevin, et pas comme les gens de la côte qui, comme sur la côte américaine, donnent dans le melting-pot… ! Et le bocain est encore quelqu’un de différent. Toutes ces composantes ont déjà mis tellement de temps à arriver à un certain équilibre, à s’entendre, qu’il est difficile d’imaginer la suppression du département Vendée…! ___ Interview et Dossier réalisés par . Philippe Brossard-Lotz Le Reporter sablais [/et_bloom_locked]